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appel         Le  yoga  de  Patanjali
   d'  aprés  les  écrits  traditionnels
 de  l'
Université  historique du  yoga

Le Yoga classique, celui de Patañjali, commence là où finit le sâmkhya. Patañjali s'approprie presque entièrement la philosophie sâmkhya à deux notions près, et il ne pense pas que la connaissance métaphysique puisse à elle seule conduire à la libération suprême.
La libération doit, pour ainsi dire, être conquise de haute lutte, au moyen d'une technique ascétique et d'une méthode de méditation: le yogadarçana. Le but de cette lute yoguique est de supprimer la conscience normale au profit d'une conscience qualitativement autre, laquelle seule pourra comprendre exhaustivement dans toutes ses implications cette vérité de la distinction entre le purusha et la prakriti. Or, la suppression de la conscience ordinaire n'est pas pour le yoga si facile à obtenir. Outre le savoir (darçana), elle implique aussi une pratique (abhyâsa) et une ascèse (tapas).
Différences entre le sâmkhya et le yoga
Les darçana-s du sâmkhya et du yoga se ressemblent à tel point que la plupart des affirmations de l'un sont aussi valables pour l'autre. Mais il y a deux différences essentielles:
1. Le sâmkhya est athée; il ne croit pas en l'existence d'un Seigneur suprême, mais ne nie cependant pas l'existence d'une pluralité de dieux, qui représentent d'autres modalités d'incarnation (karma-deva). Le yoga est  théiste. Il postule l'existence d'un Dieu suprême auquel Patañjali donne le nom générique d'Îçvara (Seigneur). Il est vrai que ce Dieu est une figure pâle et floue. Il ne s'agit nullement d'un dieu créateur, mais l'îçvara du yoga est tout simplement un purusha éternellement libre, qui n'a jamais été asservi à la prakriti, et qui ne s'est jamais incarné, et qui peut être l'objet de la méditation yoguique.
2. Alors que selon le sâmkhya la voie du salut est essentiellement celle de la connaissance, le yoga accorde une importance considérable aux techniques de méditation.
 
Sur Patañjali, on sait très peut de choses, sinon qu'il a composé les fameux yogasûtra qui codifient le yoga classique: le râjayoga.( entre le - 2ème s. et le + 5ème s. )
Définition du yoga par Patañjali:
" yogaç citta-vritti-nirodhah"
"Le yoga est l'arrêt du tourbillon de la conscience".
Pour pouvoir arrêter ce tourbillon des états de conscience, il faut d'abord en prendre conscience expérimentalement.
Ces états de conscience sont en nombre illimité (un peu comme les gunas), mais on peut les classer en trois catégories, correspondant respectivement à trois possibilités d'expériences:
1.    les erreurs et les illusions: rêves, hallucinations, erreurs de perception, confusions
2.    la totalité des expériences psychologiques ordinaires quotidiennes: tout ce que l'on sent, pense, tout ce qui traverse l'esprit de l'homme ordinaire, de celui qui ne pratique pas le yoga
3.    Hors concours: les expériences méta-psychologiques induites par les techniques yoguiques et accessibles aux seuls initiés.
Il s'agit, dans le yoga, de prendre d'abord conscience de ces états mentaux qui nous agitent perpétuellement, les connaître expérimentalement par la pratique du yoga, pas à pas grâce à une longue série d'exercices qui demandent à être réalisés successivement sans hâte, sans impatience . Ainsi on commence à travailler et à manier ces citta-vritti qui constituent le fleuve psychomental. Ce travail est un travail de très longue haleine, au cours duquel on rencontre des obstacles considérables. Car, même si on parvient à anéantir le tourbillon actuel, d'autres viendront, sans tarder, les remplacer. Ces tourbillons proviennent d'immenses réservoirs qui se trouvent dans notre subconcient (vâsanâ).
Les vâsanâ   sont des forces subconscientes, subliminales, qui constituent d'énormes obstacles sur la voie de la libération, pour deux raisons:
1.    Ces sont les vâsanâ qui alimentent sans cesse le flux psycho-mental, la série infinie des citta-vritti .En d'autres termes, la vie n'est qu'une décharge continuelle de vâsanâ. L'existence humaine n'est qu'une actualisation ininterrompue des forces subconscientes au moyen des expériences conscientes.
2.    Ces forces, précisément parce qu'elles sont subliminales, présentent un caractère insaisissable et incontrôlable.
Ce n'est que par le yoga que ces forces subconscientes peuvent être connues, contrôlées, maîtrisées, et donc brûlées et anéanties. A partir du moment où elles sont connues, elles sont brûlées
      Les huit degrés du hatha-yoga
 
1.    Yama: refrènements
2.    Niyama: disciplines
3.    Âsana : postures
4.    Prânâyâma: discipline du souffle
5.    Pratyâhâra: rétraction des sens
6.    Dhâranâ: concentration
7.    Dhyâna: méditation
8.    Samâdhi: entase
 
1. Les refrènements
 
Ahimsâ (non-nuisance): ne causer du mal à aucune créature, par aucun moyen et jamais
Satya (vérité): accorder ses paroles et ses actes
Asteya (ne pas voler): non seulement s'abstenir de s'emparer illégalement des biens d'autrui, ,      mais destruction même du désir des biens d'autrui.
Brahmacarya : Maîtrise  de  l' activité sexuelle,  le  célobat  n'  est pas  une  régle,  
                         inclus  aussi  lenon-désir de possession:  savoir vivre au jour le jour.

 
2. Les niyama-s: disciplines corporelles et psychiques  
. Cauca (purification); il s'agit de la purification interne des organes par des exercices appropriés (genre nauli), ou la purification des nâdi (canaux où circule l'énergie subtile) par le prâna. Parallèlement, il convient de se purifier l'esprit.

. Samtosha (sérénité dans l'existence): "absence du désir d'amplifier les nécessités de l'existence" (commentaire de Vyâsa)
. Tapas (ascèse): maîtrise totale des désirs. Cette maîtrise n'a pas pour but une mortification, mais de réaliser un gain positif: le yogin étant par là la puissance sur ce à quoi il renonce.
. Svâdhyâya: étude personnelle quotidienne des textes du yoga.
.  Îçvara-pranidhâna: méditation sur le Seigneur, effort pour faire du Seigneur le but de toutes nos actions.


3. L'âsana: la posture yoguique  décrite comme devant être stable et agréable (sthira-sukha). L'âsana ne se décrit pas: il s'apprend du maître (guru). Il doit faire oublier le corps, lui donner une assise stable et réduire l'effort physique au minimum. Le but est de réaliser la neutralité des sens. La conscience ne doit plus être troublée par la présence du corps.
L'âsana marque un premier transcendement de la condition humaine. Dans la vie ordinaire, nous sommes mobiles agités, arythmiques. Maintenant on prend en main son corps.
L'âsana est l'exact équivalent pour le corps de la concentration ,en un seul point, de l 'esprit. Le corps est comme concentré en un seul point.
Le refus de bouger est l'exact équivalent du refus de se laisser porter par le fleuve impétueux de la conscience, et le refus de respirer de manière arythmique.

 4.  Prânâyâma: contrôle du souffle

"Le prânayâma est l'arrêt des mouvements inspiratoires et expiratoires, et il s'obtient, après que l'âsana a été réalisé" la raison théorique de cette pratique est que la respiration est la seule fonction végétative que nous puissions contrôler et qu'il y a un lien entre respiration et conscience.
La rétention de la respiration doit faciliter la concentration sur un seul objet, elle ouvre l'espace de la méditation. Il s'agit de connaître la pulsation de sa propre vie. C'est une attention dirigée sur la vie organique, une entrée calme et lucide dans l'essence de la vie.

5. Pratyâhâra: la rétraction (  retournement ) des sens

C'est se déconnecter, se déprendre du monde extérieur .
Il s'agit de se déconnecter non seulement par rapport aux stimuli extérieurs, mais aussi fasse aux fantasmes qui nous assaillent perpétuellement. Désormais le yogin ne sera plus troublé ou distrait par les sens ou les représentations de l'inconscient.

 6.  L'ekagratâ (concentration en un seul point) suivi de la dhârana (concentration)
Le but de l'ekagratâ est de fixer le flux de la conscience en un seul point.
La dhârana a un contenu notionnel. Il s'agit de fixer la pensée afin de comprendre. Traditionnellement, la concentration se fait sur le chakra (centre énergétique) du nombril, dans le lotus du cœur, sur la pointe du nez…ou sur n'importe quel endroit ou objet du monde extérieur.

 7.  Dhyâna: méditation
Quand la concentration dure un certain temps (les textes traditionnels parlent d'une durée équivalentes à 12 rétentions du souffle), on arrive au dhyâna (qui a donné le japonais zen), la méditation  définit comme "un courant de conscience unifiée".

 8. Le samâdhi: entase
C'est une expérience indescriptible, un état dans lequel la conscience saisit immédiatement l'objet sur lequel elle médite, sans l'aide d'aucune catégorie intellectuelle.
On distingue deux sortes de samâdhi:
a.    le samprajãta-samâdhi: enstase qualifiée, avec support
b.    l'asamprajãta- ou nirvikalpa-samâdhi: enstase non qualifiée, sans support.
L'enstase qualifiée est une enstase où le Soi (âtman) s'identifie à un objet précis pour le connaître intimement, sans l'intervention d'aucune catégorie intellectuelle, ni de l'imagination. L 'entase non qualifiée est stade ultime du yoga. Elle est dite non qualifiée, parce que l'âtman ne médite plus sur un objet, mais sur lui-même. C'est un état sans contenu sensoriel et sans structure intellectuelle. L 'âtman médite sur lui-même, et n'a donc plus de relations avec le monde extérieur. A ce moment-là, le yogin est un délivré-vivant, jivan-mukta   (donc n'accumule plus de karman)
 
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